Le gouvernement de Trinidad et Tobago, dont la première ministre
exerce la présidence de la communauté économique caribéenne (Caricom),
exhorte la République Dominicaine à prendre des mesures immédiates pour
restituer la nationalité dominicaine aux centaines de milliers de
personnes, rendues apatrides par l’arrêt TC168-13 de la Cour
Constitutionnelle dominicaine en date du 23 septembre 2013.
«
Pour Trinidad et Tobago, la souveraineté ne devrait pas être invoquée
comme une défense pour des violations de droits humains », indique la
première ministre Kamla Parsad Bissessar, dans une lettre adressée, le
19 décembre 2013, au président dominicain Danilo Medina et dont a pris
connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
Le gouvernement de
Trinidad et Tobago juge inacceptables l’aspect rétroactif (jusqu’à
l’année 1929) de la sentence de la cour constitutionnelle dominicaine
ainsi que son impact disproportionné sur les personnes d’ascendance
haïtienne en République Dominicaine.
Il s’agit bien d’un
processus visant à déchoir de la nationalité dominicaine « les
générations de certaines familles, qui détenaient auparavant la
nationalité dominicaine et avaient obtenu des documents d’identification
nationale et qui avaient exercé leurs droits en divers aspects de la
vie en République Dominicaine, comme l’exercice du droit de vote aux
élections ».
« N’importe quel engagement à naturaliser ces
personnes est en contradiction avec les normes établies et les
principes, par lesquels les cadres de naturalisation représentent un
moyen pour des ressortissants étrangers d’acquérir une nationalité. Cela
n’est pas applicable en l’espèce », souligne la lettre de Parsad
Bissessar à Medina.
C’est ce qui explique le qualificatif de «
discriminatoire », attribué à ladite sentence du 23 septembre 2013 par
un certain nombre d’États, ainsi que des organismes internationaux et
des organisations non gouvernementales (Ong).
Ce qui, visiblement, ternit l’image de la République Dominicaine à l’échelle mondiale.
La
première ministre de Trinidad et Tobago salue l’annonce de la
nomination prochaine, par la République Dominicaine et Haïti, de deux
commissions pour traiter des questions de l’immigration et du commerce
aussi bien que de la pauvreté et l’environnement, suivant différents
reportages en la matière.
Le 20 novembre 2013, Medina a signé le
décret 327-13 qui établit les termes des conditions à la légalisation
des "étrangers" en situation irrégulière en République Dominicaine.
«
Malheureusement, à mon humble avis, ces efforts se situent en deçà de
ce qui est nécessaire pour corriger la situation troublante, provoquée
au détriment des personnes qui ont été particulièrement touchées par cet
arrêt. À cet égard, je voudrais souligner la profonde préoccupation de
mon gouvernement face à la situation de ces personnes, qui ont été
déchues de leur nationalité et dont le nombre est estimé à plus de
200,000. La violation de leur droit à la personnalité juridique a laissé
beaucoup d’entre elles dans un état de vulnérabilité, avec des
conséquences graves pour le plein exercice de leurs droits humains. Elle
porte atteinte également aux obligations internationales en matière de
droits de la personne, obligations librement contractées par l’État
dominicain », relève la première ministre trinitéenne Kamla Parsad
Bissessar.
En Haïti, de nombreuses voix s’élèvent, à l’exemple du
Comité Mémoire 1937 (CM1937), pour « exhorter le gouvernement haïtien à
éviter de tomber dans le piège de transformer en un dialogue bilatéral
la question d’ordre international », soulevée par la sentence du 23
septembre 2013,. et « de se laisser entraîner à signer des accords, au
détriment de la population haïtienne et, en particulier, de ses couches
les plus vulnérables, exposées à toutes sortes de tracasseries
administratives et d’abus en territoire dominicain ».
« Cette
mort civile, infligée, en 2013, à des centaines de milliers de
Dominicains d’origine haïtienne, n’est pas sans rappeler le génocide
physique, commis, en 1937, sur des dizaines de milliers de migrants
haïtiens et leurs familles, ainsi que sur des Dominicains eux-mêmes sur
la base de leur phénotype ».
Le Comité Mémoire 1937 s’interroge sur cette pratique de mettre de côté les canaux institutionnels réguliers.
Prenant
acte du « plan spécial de naturalisation des étrangers, montrant un
enracinement en République Dominicaine », le CM1937 se demande si
certains articles, par leur niveau d’exigences difficiles à remplir,
n’ouvrent pas la voie à des applications discriminatoires.
Alter Presse
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